La Culture Haitienne

Publié le par Nicolas Delatour

Carte de Saint-Domingue

 

Haiti: Une Vision Différente

Haiti, stéréotypée de noms les plus insultants ou farfelus: pays le plus pauvre de la terre, pays du VIH Sida, du Vodou ou de la sorcellerie, terre des zombies, alors que Haiti est un pays multi-culturel, multi-racial, un « melting pot » à l’instar des Etats Unis d’ Amérique.

Insulter la culture haitienne, c’est insulter les cultures de 4 continents: l’Amérique, l’Europe, l’Afrique et l’Asie.

La culture haitienne a commencé avec les Tainos, Arrawacs, peuples amerindiens venus des côtes de l’Amérique du Sud. Elle a débuté son metissage avec l’arrivée de Christophe Colomb et des Espagnols. C’est à l’ile de la Tortue, où sont venus s’installer les français chassés de l’ile Sainte-Croix, que commencera la création de la colonie de Saint-Domingue qui deviendra plus tard la République d’Haiti.

L’esclavage, cette ignominie, permettra l’arrivée en force de ressortissants de plusieurs royaumes d’Afrique qui viendront, par leurs apports culturels déterminants, forger cette culture créole que nous chérissons tous et qui est et devrait être l’objet de la fierté haitienne.

L’arrivée en Haiti, dès le début du XIXème siècle, d’ immigrants allemands, polonais, italiens, juifs, palestiniens, syriens et Libanais, ne manquera pas d’ ajouter à ce brassage culturel.

L’occupation du pays par les Etats Unis d’Amérique de 1914 à 1935, l’arrivée en masse de missionaires protestants et l’influence des médias modernes américains, viennent encore renforcer ce brassage.

Le site HAITI-CULTURE.com essaye le plus possible de montrer une face et une vision différente de ce petit pays, mais de cette grande nation.
(Haiti-Culture)

Haiti a inauguré, en 1791, le cycle des abolitions de l’esclavage. C’est son armée d’esclaves noirs qui a infligé aux troupes de Napoléon Bonaparte l’une de leurs plus cuisantes défaites. Ces deux événements suffiraient à lui conférer sa grandeur historique. Mais celle-ci lui vient surtout du caractère universel de la Révolution haitienne que l’occident n’a eu de cesse d’occulter.

Une Révolution Exportatrice de Liberté

1- Tout de suite après l’indépendance en 1804, Dessalines entreprit en Mai 1806, le projet de libérer la Martinique, la Guadeloupe et Marie Galante. Il commençait à armer au cours de l’année 1805 de nombreux petits bâtiments et déléguait des émissaires pour provoquer des révoltes d’esclaves dans les colonies françaises, anglaises et espagnoles.

 

Roberjot Lartigue, agent français en service à Saint-Thomas, en témoigne.

2- En 1805, le fondateur de l’indépendance haïtienne a reçu, conseillé et aidé MIRANDA pour libérer la Bolivie.

3- Alexandre PETION a reçu à deux reprises (1815 et 1816) Bolivar, l’a aidé en hommes et en munitions dans sa lutte pour libérer le Venezuela : "En 1815, Haiti se convertit non seulement en important fournisseur d’approvisionnement mais aussi en première base navale. Le gouvernement d’Haiti s’engagea à accorder toutes aides et facilités à la condition que soit proclamée la liberté générale des esclaves au Venezuela. Pétion s’engagea à dépêcher le "Wilber force", puissant navire de guerre haïtien en assistance aux patriotes pour patrouiller devant les côtes vénézuéliennes.

 

 

 

Une Révolution Profondément Humaniste

1- La constitution haïtienne de 1816, en son article 44, reconnait la nationalité Haïtienne à quiconque, africain ou asiatique, viendrait s’établir en Haiti.

2- Haiti a accueilli comme haitiens les polonais enrôlés dans le corps expéditionnaire de Bonaparte et qui se fondent dans la population haïtienne comme citoyens à part entière.

On les retrouve surtout à Casale.

3- Haiti a offert l’asile politique aux anciens "Montagnards" de la Convention Française à partir de la réaction Thermidorienne. Leurs descendants vivent encore à Jacmel. Ainsi, Billaud-Varenne est venu se réfugier en Haiti où il est mort, entouré de la considération générale. Il en fut de même du fils de Camille DESM0ULIN et de plusieurs membres de sa famille.

4-Haiti a accueilli des américains noirs au XIXe siècle en deux vagues successives.

5- Haiti a pris fait et cause pour la Grèce et manifesté publiquement " à la face de l’univers" la solidarité nationale haitienne avec la lutte des grecs pour leur liberté et leur indépendance en 1821, 1822.

6-Haiti a défendu à la Société Des Nations (SDN) l’Abyssinie (l’Ethiopie du Négus) agressée par l’Italie fasciste de Mussolini.

Tout a été fait pour gommer de l’histoire les avancées positives rendues possibles par la libération autant que les initiatives visionnaires des gouvernants haitiens après l’Indépendance.

Dessalines: Socialiste avant l’heure.

Après avoir annulé tous les titres de propriété frauduleux et douteux des affranchis qui prétendaient avoir des filiations aux colons chassés ou assassinés, l’empereur s’écria:

 

"Et les pauvres nègres dont les pères sont en Afrique, ils n’auront rien ?"

 

Plus tard, il imposa que la constitution de 1806 stipule:

 

"la propriété appartient à la nation haitienne."

 

Et ,sentant venir la conspiration, il met en garde:

 

"Avant la prise contre Leclerc, les hommes de couleur, fils de blancs, ne recueillaient point la succession de leurs pères ; comment se fait-il que depuis qu’on a chassé les colons, leurs enfants réclament leurs biens... Prenez garde à vous nègres et mulâtres. Nous avons combattu contre les blancs. Les biens que nous avons acquis en versant notre sang appartiennent à nous tous ; j’entends qu’ils soient partagés avec équité."

Christophe: Promoteur de l’Education.

1- Il est comparé a un Frédéric II de Prusse. Bâtisseur, il fait construire l’extraordinaire palais "Sans Souci" et la citadelle Laferrière, fierté du peuple Haitien, considérée comme la huitième merveille du monde, classée par l’UNESCO comme patrimoine de l’humanité.

2- Il mena avec succès une politique d’extension systématique de l’instruction publique et a beaucoup mis l’accent sur la discipline et l’éducation avec l’aide de ses amis anglais Wilberforce et Clarkson.

3- Sous le règne de Christophe, des petits haitiens allaient déjà à l’école de médecine. Et le royaume fabriquait ses propres armes.

4- Il fit introduire dans son royaume des charrues modernes à titre expérimental. vers 1818. Il avait foi dans l’indépendance économique et favorisa ainsi un idéal d’auto suffisance. Son secrétaire, Vastey, écrit :" Une nation doit être capable de suppléer elle-même à tous ses besoins principaux. Si elle dépend pour sa subsistance de marchés étrangers, elle n’a plus dans ses mains le contrôle de son indépendance."

Le développement de l’autosuffisance alimentaire.

1- De l’indépendance à l’occupation américaine, Haiti demeurait, en dépit de tout, un pays essentiellement riche de son agriculture: une agriculture qui misait sur la qualité des produits. La preuve le café haïtien, variété des Matheux dite café de Saint-Marc, réputé le meilleur du monde pendant longtemps, servait à bonifier les autres cafés, comme cela était enseigné à l’Ecole Coloniale de Paris en 1901 par le professeur C. Raoul. Le Rhum Barbancourt étant considéré par les connaisseurs comme le meilleur du monde.

 

2- L’économie haitienne reposant sur la paysannerie (75% d’agriculteurs) a toujours été jusqu’à l’occupation américaine, voire un peu après, tout-à -fait autosuffisante.

3- Les riz haïtiens ( "la crête", "riz jaune","madan gougousse") cultivés dans les plaines de l’Artibonite, de grande qualité, ont été supplantés par les riz de Miami, imposés par les états-uniens, le plus souvent sous couvert d’aide.

4- Haiti, jusqu’à tout récemment, a été le premier exportateur de mangues de qualité vers les USA.

5- Haiti est le premier pays de la région à inaugurer (1949- 1950) le tourisme de qualité, avec ses grands hôtels de luxe, ainsi que le tourisme historico-culturel avec ses monuments et son folklore. C’était " Vive la différence" sous la présidence de Dumarsais Estimé.

Le génie du peuple haitien.

Qui connait réellement la société haitienne admettra surement que sa population a toujours su faire preuve d’un formidable génie pour résister aux épreuves: On pense à sa capacité à optimiser le rendement des cultures diversifiées sur les parcelles de terre, on pense aux capacités inventives dans l’artisanat et la production de biens nécessaires à la vie quotidienne. D’autre part, il serait intéressant d’étudier les facteurs qui expliquent comment un peuple à qui l’on refuse le droit à l’instruction puisse produire une telle préthore d’intellectuels de très haut niveau. La haute conscience de son identité et un héritage culturel cultivant la dignité y sont certainement pour quelque chose.

L’art haitien (littérature, peinture, sculpture, ferronnerie, musique, théâtre) se passe de présentation. Une chose est sure est qu’il a largement influencé la culture de l’ensemble caribéen et même au-delà.

1-Littérature : Citons quelques noms illustrant la littérature haitienne qui s’exprime en quatre langues (français, créole, anglais, espagnol)

Anténor Firmin (De l’égalité des races humaines, réponse à Gobineau, qui a défrayé la chronique en France lors de sa parution) ; Hannibal Price ( Programme : "La réhabilitation de la race noire par la République d’Haiti") ; Demesvar Delorme; Louis Joseph Janvier("Aimer son pays et sa race de furieuse amour") ; Etzer Villaire, Jean Price Mars (précurseur de la négritude) ;Jacques Roumain; Jacques Stephen Alexis, Marie Chauvet, René Depestre ; Magloire Saint-Aude, Edwige Danticat ; Dany Laferrière ; Gary Victor, Maurice Sixto (maitre de l’audience, genre typiquement haitien).

2- Peinture : La peinture "naïve" haïtienne est internationalement connue. Outre qu’il convient de s’interroger sur le choix de ce qualificatif manifestement connoté, il faut insister sur le fait qu’elle ne représente qu’un pan de la peinture Haitienne.

Entre l’école du Cap-Haitien avec les frères 0bin et le mouvement Saint-Soleil avec les paysans de Kenskoff menés par Tiga et dont André Malraux a largement fait la publicité à travers le monde, il y a tellement de variantes, de recherches, d’invention, de modernité et d’originalité!

Citons quelques noms remarquables : Bernard Wah; Préfète Duffaut; André Pierre; Bernard Séjourné; Valcin I et II; Stevenson Magloire; Jean Michel Basquiat; Hervé Télémaque; Jacques Enguerand Gourgue; Jean René Jérôme; Marie-Rose Desruisseau.

Publié dans Cultures

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